
« La persuasion n’est pas une science, mais un art. »
Il est considéré comme l’une des figures les plus importantes de l’histoire publicitaire américaine et il a participé à révolutionner la créativité des 60’s et des 70’s. C’est William Bernbach.
Les débuts de Bill Bernbach
William Bernbach, dit Bill Bernbach, est un publicitaire américain né le 13 août 1911 à New-York, dans une famille juive. Ayant grandi dans le Bronx, il est scolarisé dans des écoles publiques, puis il étudie à l’Université de New York d’où il ressort diplômé en anglais en 1932. Il a également étudié l’administration des affaires et la philosophie.
Il commence sa carrière en 1933 en travaillant pour la distillerie Schenley Distillers, au poste de directeur de la salle de courrier. Il y a rédigé une publicité pour leur crème de whiskey, qui lui a valu d’être promu au service publicité.
Il y restera jusqu’en 1939, date à laquelle il écrit pour pour Grover Whalen , directeur de l’ Exposition universelle de 1939. En 1940, il intègre l’industrie de la publicité en entrant à l’agence William Weintraub. Deux ans plus tard, il occupe un poste chez Coty, avant de devenir rédacteur publicitaire pour l’agence Grey Advertising, où il va apprendre le copywriting.
Il en deviendra le directeur créatif en 1947.
1949, le tournant Doyle Dane Bernbach
Bernbach commence à être frustré par les publicités de l’époque qui se ressemblent toutes. Pour lui :
« La publicité est fondamentalement une démarche de persuasion, et la persuasion n’est pas une science, mais un art. »
Cette citation est tirée de la lettre qu’il a écrite à sa direction, dans laquelle il exprime son inquiétude que la technique prenne le pas sur la créativité. En voici un extrait :
« Il y a beaucoup de grands techniciens dans la publicité. Et malheureusement, ils parlent du meilleur jeu. Ils connaissent toutes les règles. Ils peuvent vous dire que les personnes figurant dans une annonce vous permettront d’obtenir un plus grand lectorat. Ils peuvent vous dire qu’une phrase doit être telle ou telle longue. Ils peuvent vous dire que le corps du texte doit être divisé pour une lecture plus facile. Ils peuvent vous donner fait après fait après fait. Ce sont les scientifiques de la publicité. Mais il y a un petit hic. La publicité est fondamentalement une démarche de persuasion, et la persuasion n’est pas une science, mais un art.
C’est cette étincelle créative dont je suis si jaloux pour notre agence et que j’ai si désespérément peur de perdre. Je ne veux pas d’académiciens. Je ne veux pas de scientifiques. Je ne veux pas de gens qui font les bonnes choses. Je veux des gens qui font des choses inspirantes. »
Extrait de “Bill Bernbach’s Book: A History of Advertising That Changed the History Advertising” © de Evelyn Bernbach et Bob Levenson.
En 1949, Bernbach est à un tournant de sa carrière. Il crée son agence de publicité avec James Edwin Doyle, rencontré chez Grey Advertising, et Maxwell Dane, qui dirigeait déjà une petite agence. Le nom de l’agence est simple, mais efficace : DDB pour Doyle, Dane, Bernbach, leurs noms. C’est cette agence qui va lancer l’évolution créative de la publicité aux États-Unis.
Là, il laisse s’exprimer sa créativité et ses idées excentriques. À l’époque, la tendance était à l’exagération : tout était « gros », avec beaucoup de texte et de visuels. Bill Bernbach va prendre le contrepied avec l’une de ses publicités les plus célèbres.
Pensez petit
Nous sommes en 1959. L’entreprise automobile allemande Wolkswagen devient cliente de DDB. L’agence a pour mission de vendre la désormais célèbre Coccinelle. Mais la mission est difficile, car il faut “vendre une voiture nazie dans une ville juive”.
En effet, nous sommes dans le contexte des États-Unis de l’après-guerre. Avec le baby-boom, les Américains sont devenus des grands consommateurs et ils cherchent avant tout des voitures familiales. Mais aussi des grandes voitures, comme les Cadillac.
La Coccinelle partait avec un sacré handicap, parce qu’elle était “compacte et d’apparence étrange” et surtout, elle était fabriquée en Allemagne dans une usine construite par les nazis.
À l’époque, les publicités pour les voitures présentaient surtout des informations techniques – ce que Bernbach détestait – au lieu de persuader le lecteur de les acheter.

On peut le voir dans cette publicité pour Corvette : la voiture prend toute la place, elle est très longue, et en-dessous, un croquis présentant les caractéristiques techniques du modèle.
On nous parle de son châssis avec une tenue de route et un équilibre presque incroyables, d’une impulsion et d’une capacité presque incroyables…
Même si au début du texte, on parle d’une voiture pour des personnes exigentes, d’une voiture élégante et d’un style original, on reste quand même sur des caractéristiques techniques, telles que « comportement routier impeccable », « se déplace avec souplesse ».
Il n’y a pas vraiment d’émotions dans ce texte. Il est très factuel, on ne s’adresse pas directement aux futurs acheteurs.
endroit mDans cette campagne créée par Julian Koenig et validée par Bernbach, on fait tout le contraire pour vendre la Coccinelle : la campagne joue sur la petite taille de la voiture, ce qui la différencie des modèles contemporains, l’espace est majoritairement blanc, ce qui souligne sa simplicité et son minimalisme.
Un slogan bien visible : « Think smart » (« Pensez petit ») et en-dessous, non plus des caractéristiques, mais des bénéfices à posséder une petite voiture : elle consomme moins d’essence, elle coûte moins cher en entretien et en assurance, se garer dans des espaces plus petits, etc.
Fini le luxe et la puissance, la campagne est simple, comme la voiture.

Et surtout, on s’adresse directement au consommateur. On lui explique que même si elle est plus petite que les autres voitures, il y a quand même la place pour les jambes à l’avant; qu’il va pouvoir enfin se garer dans des endroits minuscules. Et on amène de la preuve sociale avec la dernière phrase : « En 1959, environ 120 000 Américains ont pensé petit et ont acheté une Volkswagen. Pensez-y. »
C’est subtil, mais la police utilisée était aussi différentes de celles qu’on voyait à l’époque : il s’agit d’une police sans empattement.
Tout ici est nouveau, que ce soit au niveau de la simplicité, que du fait de s’adresser directement aux consommateurs.
Cette campagne publicitaire est au top du classement des publicités du xxe siècle paru dans le magazine publicitaire américain Advertising Age dans une enquête sur les publicités nord-américaines.
Parmi les autres campagnes célèbres de l’agence, on peut citer We Try Harder pour la société de location de voitures Avis, ou It’s so simple pour Polaroid.
L’héritage de Bernbach
La « patte » de Bernbach était la simplicité et la créativité.
De même, il aurait été le premier à combiner rédacteurs et directeurs artistiques en équipes de deux personnes, deux départements autrefois séparés. Ce modèle est toujours d’actualité aujourd’hui.
Parmi les nombreuses récompenses qu’il a reçues, on peut citer le prix de l’homme de l’année de la publicité en 1964 et 1965, et The Pulse Inc., le prix de l’homme de l’année en 1966. Il a été intronisé au Copywriters Hall of Fame en 1964 et au Temple de la renommée de l’American Advertising Federation en 1976. Il a également été nommé « meilleur directeur d’agence de publicité » en 1969.
Enfin, de nos jours, on peut noter que William Bernbach reste une référence, puisque la série Mad Men fait de nombreuses références à ce génie de la publicité.
Il meurt le 2 octobre 1982 à New York.
Citations de William Bernbach
« Laissez nous prouver au monde que le bon goût, le bon art, et la bonne écriture peuvent être vendeurs. »
« Personne ne compte le nombre de pubs que vous faites; On ne se souvient que de l’empreinte que vous laissez. »
« La persuasion n’est pas une science, mais un art. »
« Gardez-les simples et stupides et ils deviendront de bons consommateurs. »
« Les règles sont brisées par les artistes; L’inoubliable ne naît jamais d’une formule toute faite. »
“L’élément le plus puissant de la publicité est la vérité.”
“Le bouche à oreille est le meilleur moyen de communication qui soit.”